Auteurs
Joseph Larmarange et Christophe Broqua
Résumé
Contexte
Y compris en Afrique sub-saharienne, les hommes ayant des rapports sexuels avec d‘autres hommes (HSH) sont plus à risque de s’infecter par le VIH que la population générale. Dans ce groupe, les bisexuels sont souvent perçus comme plus « à risque » que les homosexuels exclusifs et pouvant constituer une « passerelle épidémique » avec la population générale, sur la base de l’hypothèse selon laquelle les bisexuels seraient moins susceptibles de se conformer aux normes préventives que les homosexuels exclusifs.
Objectif
Proposer une synthèse des connaissances sur les différentes catégories d’homo-bisexuels dans les enquêtes épidémiologiques réalisées en Afrique sub-saharienne depuis 2004 et sur leur exposition au VIH.
Méthodes
À partir d’une revue de la littérature, nous avons retenu les publications présentant des estimations quantifiées de la bisexualité, mesurée en fonction des enquêtes selon trois dimensions : le pôle d’activité sexuelle (sexe des partenaires sexuels sur une période donnée), l’identité déclarée et l’attirance sexuelle. Nous avons examiné : (i) les taux de bisexualité calculés selon ces trois dimensions ; (ii) les taux de prévalence du VIH par groupe (et les odds-ratio correspondants) et (iii) des indicateurs de comportements selon l’orientation sexuelle.
Résultats
Les taux de bisexualité varient fortement d’une étude à l’autre (de 12 à 94%) et selon l’indicateur retenu. Globalement, les taux observés en Afrique de l’Ouest sont sensiblement plus élevés que ceux d’Afrique australe, l’Afrique centrale et de l’Est étant dans une situation intermédiaire.
À l’exception de deux études, la prévalence du VIH observée parmi les bisexuels est inférieure à celle des homosexuels exclusifs, quelle que soit la dimension considérée pour définir ces deux groupes (voir figure). Les différences de prévalence selon l’identité déclarée sont plus marquées que selon le pôle d’activité sexuelle.
La majorité des études n’ont pas relevé de différence d’utilisation du préservatif entre bisexuels et homosexuels exclusifs. Les bisexuels ont parfois une fréquence de rapports sexuels moindre et systématiquement moins de rapports anaux réceptifs que les homosexuels exclusifs. Ils ont commencé leur vie sexuelle avec les hommes plus tardivement et ont eu moins de partenaires masculins au cours de leur vie. Par contre, ils sont moins nombreux à avoir déjà fait un test de dépistage du VIH.
Conclusion et recommandations
La bisexualité est multiforme en Afrique sub-saharienne : les bisexuels ne constituent pas un groupe homogène et les identités sexuelles sont si diverses qu’une simple opposition homosexuels vs. bisexuels est réductrice. Toutefois, selon les enquêtes disponibles et quelle que soit la dimension considérée pour mesurer la bisexualité, les bisexuels sont moins exposés au VIH que les homosexuels exclusifs. S’il reste important que les programmes de prévention et de traitement prennent en compte les bisexuels, les homosexuels exclusifs doivent rester une cible prioritaire pour l’accès aux nouveaux outils de la prévention et du soin.
Référence
Larmarange Joseph et Broqua Christophe (2018) « Les hommes bisexuels sont-ils plus exposés au VIH que les homosexuels exclusifs en Afrique subsaharienne ? » (communication orale PC16.04), présenté à 9e Conférence Internationale Francophone sur le VIH et les Hépatites Virales (AFRAVIH 2018), Bordeaux.